lundi 20 décembre 2010, par jishane
LA GÉNÈSE DE LA LOI : SIX MOIS DE BOULEVERSEMENTS SUR LES CAMPUS
Dès juin 2007, Nicolas Sarkozy s’est attelé à cette promesse de campagne : moderniser des universités en perte de vitesse et réformer ce qui était devenu, depuis l‘épisode de Malik Oussekine en 1986, pratiquement intouchable. Après quelques semaines de concertation parfois tendues avec les étudiants (qui obtiennent le retrait de la sélection), la nouvelle ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Valérie Pécresse, présente au début de l’été un projet de loi que le Parlement valide aussitôt. Si les présidents d’universités (dont les pouvoirs sont renforcés) applaudissent, les principaux syndicats d’enseignants et d’étudiants sont plus circonspects. Après une rentrée calme, des collectifs font descendre dans la rue étudiants, lycéens et enseignants, agitant la menace d’une « privatisation » des facs. Une trentaine d’établissements sont perturbés et le malaise perdure plusieurs semaines. Le gouvernement campe sur son texte mais pour tenter de dissiper les inquiétudes débloque des moyens : outre la hausse de 50 % du budget des universités en 5 ans, il s’engage à vendre une partie du capital d’EDF (3,7 milliards) pour rénover les campus et Valérie Pécresse s’engage à lutter contre l’échec en licence en proposant plus d’heures de cours, de stages et de langues.
DES RESPONSABILITÉS ET COMPÉTENCES ÉLARGIES
La loi sur les libertés et responsabilités des universités transfère des compétences patrimoniales, budgétaires et salariales aux universités, assouplit leurs règles de gestion et les ouvre au monde de l’entreprise.
Masse salariale : Jusqu’ici gérée par l’Etat, la masse salariale des universités leur est désormais pleinement dévolue. Plutôt que de remonter au ministère pour négocier leurs postes, les établissements autonomes peuvent recruter librement des contractuels et répartir les emplois comme ils l’entendent. Même liberté du côté des rémunérations avec la possibilité de mettre en place des primes ciblées.
Recrutement : Tandis qu’auparavant les enseignants devaient passer devant une « commission de spécialistes », nommée pour 4 ans et réunie à date fixe, ils sont désormais jugés par un comité de sélection, composé pour moitié de représentants extérieurs à l’université. Dans un second temps, c’est le comité d’administration qui nomme l’un des candidats listés. La répartition des tâches des professeurs (enseignement, recherche, etc.) est maintenant décidée par le conseil d’administration de l’université.
Système d’allocation des moyens : 20 % du budget octroyé aux universités sont désormais affectés en fonction de la performance des établissements en matière de formation et de recherche, contre 3 % auparavant. Les 80 % restant sont attribués en fonction de la « réalité de l’activité des établissements » qui prend notamment en compte le nombre d’étudiants présents aux examens (et non celui des inscrits) et le nombre d’enseignants-chercheurs publiant pour la recherche.
Mission d’insertion professionnelle : Les universités doivent notamment mettre en place des bureaux d’aide à l’insertion professionnelle, chargée de mesurer l’intégration de leurs étudiants sur le marché de l’emploi et de les aider dans la concrétisation de leur projet.
Gouvernance : Les conseils d’administration sont resserrés à 30 membres (contre une soixantaine auparavant) et plus diversifiés avec une meilleure représentation des membres extérieurs. Cette organisation est accusée de donner trop de pouvoirs aux présidents. A ce sujet, le Conseil constitutionnel a émis début août 2010 a émis une réserve, pointant que le pouvoir de veto du président d’université à une nomination ne peut « se fonder sur des motifs étrangers à l’administration de l’université ».
Dévolution du patrimoine immobilier : Les universités peuvent maintenant accéder à la propriété réelle de leur patrimoine immobilier. Une possibilité saisie seulement par une minorité d’entre elles.
Fondations : Les universités peuvent créer des fondations « universitaires » ou « partenariales » pour se rapprocher des entreprises.
LE CALENDRIER DU PASSAGE À L’AUTONOMIE
Après les 18 pionnières de 2009 et les 33 suivantes de 2010, 24 nouvelles universités deviendront autonomes au 1er janvier 2011. Ce qui portera à 90 % la proportion d’établissements autonomes à un an et demi de la date limite (août 2012) imposée par la loi relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU).